Tout au long de l'année 2021, Bretagne Grands Migrateurs lance une chronique sur la grande alose "Une année avec... la grande alose !". Aujourd'hui, le sixième épisode : le développement embryo-larvaire de la grande alose.
Dans les secondes qui suivent la ponte, l’œuf d’alose tombe sur le substrat et s’insinue dans les interstices des sédiments. L'incubation dure environ une semaine ; dans des conditions thermiques optimales (17-18°C), le temps d’incubation est de 3 à 5 jours. Au moment de l'éclosion, les œufs font moins de 5 mm. La larve qui en sort mesure entre 7 et 12 mm. Elle est alors transparente. L’œil est pigmenté tandis que la vésicule auditive, les otolithes et les arcs branchiaux sont visibles par transparence. Les larves sont lucifuges et n'ont pas encore de vessie natatoire mature ; elles ne sont donc pas capables de se déplacer dans la colonne d'eau et vivent par conséquent dans le fond des cours d'eau à l'abris des cailloux où les faibles vitesses de courant leur évitent d'être emportées.
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Larve d’alose feinte de Méditerranée au jour 4 (© MRM) |
Larve d’alose feinte de Méditerranée au jour 6 (© MRM) |
Larve d’alose feinte de Méditerranée au jour 8 (© MRM) |
Au bout de 15 à 20 jours, les larves se métamorphosent en alosons. Ils mesurent plus de 20 mm et leur morphologie se rapproche de celle de l’adulte même si le corps est sensiblement plus aplati latéralement : dos bleu-vert, ventre et flanc blanc nacré, tâche noire derrière l’opercule, encoche à la lèvre supérieure. À ce moment-là, les alosons commencent à prospecter plus largement la frayère à la recherche de nourriture.
Les premiers stades de vie sont particulièrement sensibles aux fluctuations de température. La plage optimale, correspondant à une survie supérieure à 80 % de la survie maximale, se situer entre 16,6°C et 24,8 °C. L'intervalle de tolérance, qui correspond à une survie supérieure à 5 % de la survie maximale, se situe entre 10,3 °C et 29,9 °C. Le débit peut également nuire directement ou indirectement au succès du recrutement. En effet, s'un point de vue mécanique, un débit élevé peut :
- augmenter l'abrasion des œufs sur un substrat dur,
- transporter les embryons et les larves vers des habitats inappropriés de faible densité de nourriture et d'abondance de prédateurs,
- augmenter la turbidité qui peut interférer avec la capacité d'alimentation,
- réduire la température de l'eau, retardant ainsi le développement des œufs et des larves.
La migration des alosons débute pas des mouvements transversaux locaux depuis la frayère. Ils migrent vers d’autres zones de nourrissage situées principalement le long des rives entre mi-mai et mi-septembre en fonction de la période à laquelle a eu lieu la reproduction. Leur déterminisme de migration est essentiellement d’origine trophique. Ces déplacements s’effectuent principalement de jour près du fond ou en pleine eau. A l’aube ou au crépuscule, ils se rapprochent de la surface pour y capturer des proies différentes de la journée.Les alosons ont un régime alimentaire varié et profitent de la moindre ressource offerte par le milieu. Leur régime alimentaire se diversifie par prédation sur la faune exogène (éphéméroptères et autres insectes volants.
Alosons © L. Madelon - FNPF
Le séjour fluvial des alosons est relativement court en comparaison des autres espèces amphihalines. À partir de mi-août jusqu’en décembre, les déplacements vont s’intensifier vers l’aval, depuis les parties amont jusqu’à l’estuaire. Les alosons qui mesurent alors entre 3 et 9 cm gagnent l’estuaire en quelques semaines pour commencer leur croissance en milieu marin (-> rendez-vous en septembre pour en savoir plus sur la dévalaison des alosons).
Rendez-vous fin août pour le prochain épisode !